La société française a mal à son lycée et peur de ses lycéens.
Elle a mal à son lycée qui, loin de combler la fracture sociale, l’accroît. Elle a mal à son lycée qui envoie dans l’enseignement supérieur des étudiants peu autonomes, insuffisamment préparés à la recherche documentaire, au travail en équipe, à la pratique de l’écriture longue et aux approches transdisciplinaires. Elle a mal à son lycée, clivé entre des séries et des filières qu’on ne cesse de proclamer “d'égale dignité”, mais dont la hiérarchisation reste tellement inscrite dans les esprits que les élèves des baccalauréats professionnels sont, dans l’indifférence générale, privés de philosophie, écartés d’une réflexion sur le bonheur, l’amour, la mort et l’avenir du monde. Elle a mal à son lycée qu’elle “sanctuarise” par des portiques de détection de métal, des caméras de vidéosurveillance et une inflation de sanctions disciplinaires, quand il faudrait densifier la présence des adultes en son sein, donner aux professeurs des bureaux où recevoir élèves et parents, dégager des temps de concertation pour imaginer ensemble comment partager le goût de savoir et le plaisir d’apprendre, comment transmettre les savoirs à tous et accompagner chacun. Elle a mal à son lycée qu’elle ferme à double tour un jour sur deux dans l’année quand tant d’activités de formation sont condamnées à chercher désespérément un vague local pour les accueillir.
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► Le Monde
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